
[ « Un enfant violé tous les 3 minutes en Afrique du Sud » a titré un article du Mail and Guardian en juin cette année.
Crise des masculinités :
« Ça y est, cest de nouveau la saison des soutenances de mémoires qui font partie de ma deuxième activité professionnelle de professeure associée à temps partiel.
Un des mémoires remarquable que je devais apprécier cette année traitait de la crise des masculinités en Afrique du Sud, ou plus précisément du discours public autour des hommes dans la nouvelle démocratie sud-africaine. Joël Charbit, lauteur de ce mémoire de recherche en sciences politiques, a essayé de décortiquer comment les médias et les politiciens se sont positionnés par rapport à ces nouvelles qui ont fait le tour du monde, après avoir mis en émoi lopinion publique sud-africaine : un nombre dagressions sexuelles très élevé accompagné dun nombre ridiculeusement bas dinculpations et dune prolifération du VIH/SIDA
des viols denfants et de bébés ayant atteints des « proportions épidémiques »
(« Un enfant violé tous les 3 minutes en Afrique du Sud » a titré un article du Mail and Guardian en juin cette année), etc., le tout menant à une « panique morale » en Afrique du Sud face à cette « crise des masculinités ».
Des auteurs cités dans ce mémoire mettent en avant quen Afrique du Sud la masculinité est liée, par des normes sociales et une industrie médiatique puissante, à la prouesse sexuelle et au succès économique. Malgré lexistence dinitiatives visant à répondre à « la crise de la masculinité » (forum de discussions et déchange, ateliers de formation, déducation à la santé et déducation sexuelle), il reste très difficile dencourager la formation didentités amenant les hommes à rejeter la violence et lagression.
En revenant aux années 80, avant la fin de lApartheid, on note que la masculinité avait déjà une place importante dans le conflit entre lANC (African National Congress) et lIFP (Inkhata Freedom Party), pourtant tous les deux engagés dans la lutte contre le régime dApartheid. LInkhata accusait lANC de menacer la virilité zouloue, notamment par lappel à la désobéissance civile, prônée par lANC, qui nentrait pas dans le champ de la masculinité valorisée par les normes sociales. Déjà pendant cette époque, les violences sexuelles sur des femmes, en particulier dans les « townships » (les quartiers où vivaient la majorité des populations « noires ») trouvent un certain écho dans les médias. Les tentatives dexplication se basent de manière récurrente sur lidée dune sexualité noire plus active, plus agressive, plus sauvage, bref sur des arguments raciaux et liés à un déterminisme biologique.
Cest autour de 1990 quun tournant historique sest opéré par la mise à lagenda de lANC des violences à légard des femmes et plus généralement du statut des femmes.
Les débats tournaient autour de la « triple oppression » de race, de classe et de genre et il était considéré que loppression de genre était ancrée dans la culture et dans les pratiques religieuses.
Le mouvement de libération se devait donc de trouver une réponse à ce problème.
La prise en compte de légalité de genre dans la nouvelle constitution de lAfrique du Sud post-Apartheid est en effet exemplaire.
En recherchant pourquoi cette prise en compte de la violence de genre comme problème politique na pas permis déviter la prolifération de ces violences, différents modèles dexplication, dont je partage ici deux, puisent dans lhistoire. Dune part, lusage de la violence à des fins de combat politique avait créé une « masculinité de combat » auprès dune classe de militants qui ont alors continué à faire usage de la violence (sexuelle et autre) pour atteindre leurs buts après la cessation des combats politiques. Dautre part, la dichotomie entre deux types de masculinité, la masculinité rurale noire et la masculinité urbaine noire, met laccent sur la pluralité des masculinités en Afrique du Sud. La première est qualifiée de « masculinité africaine », se basant sur une identité africaine caractérisée par des liens forts de proximité tribale et ancestrale et une africanité essentialiste à travers la représentation de « cultures africaines intemporelles », alors que la masculinité urbaine a rejeté les valeurs traditionalistes.
Dautres explications prennent en compte des facteurs psychologiques (restauration dune certaine masculinité et virilité déniées aux hommes noirs pendant la période dApartheid) et le contexte socio-économique (le taux de chômage élevé et le niveau de vie très faible de la majorité de la population noire créent une crise dans laccessibilité du mariage, la dot étant trop chère). Dans ce contexte de pauvreté, beaucoup dhommes sont non seulement incapables de remplir le rôle – attribué par eux-mêmes et par leur environnement social – de principale source de revenu du ménage. Ils peuvent aussi se sentir incapables à incorporer les nouvelles attentes des femmes en termes dégalité. Il est indéniable que les transformations structurelles de lAfrique du Sud post-Apartheid ont une influence importante sur les identités masculines, notamment par la manière dont se lient masculinité, identité et pouvoir.
Connell et Messerschmidt, deux auteurs sur le concept de la masculinité cités dans ce mémoire, distinguent différentes catégories de masculinités.
Celle qui semble poser problème en Afrique du Sud aujourdhui est la masculinité hégémonique, « qui incarne la réponse, valide à un moment donné, au problème de la légitimation du patriarcat, qui garantit (ou est censée garantir) la position dominante des hommes et la subordination des femmes ». On parle dhégémonie parce quil existe une tentative de « préserver, légitimer et naturaliser les intérêts des plus puissant marginalisant et subordonnant les voix des autres groupes ».
Néanmoins, face aux viols denfants et de bébés, le recours à des explications de lusage de la violence à des fins de maintien de la domination patriarcale ne semble pas suffire. Au-delà de la « crise de la masculinité », cest la « crise morale » de la nation qui est évoquée.
Beaucoup dautres aspects sont étudiés dans le mémoire, comme le discours sur la masculinité dans le contexte de lépidémie du sida et le positionnement très critiquable de T. Mbeki et comme la présentation de tradition et modernité comme deux positions incommensurables, par exemple dans le procès pour viol contre J. Zuma. Le mémoire devrait prochainement être consultable ici sur le site de Genre en Action permettant de mieux saisir cette recherche dans son ensemble.
Jétais en pleine lecture de ce mémoire quand les médias français ont annoncé larrestation de Roman Polanski, réalisateur franco-polonais de renom international. Arrêté en Suisse dans le contexte dune demande dextradition de la part des Etats Unis dAmérique, Polanski est inculpé de viol sur une mineure aux Etats Unis en 1977. Alors quelle venait pour une séance photo que Polanski réalisait pour un magazine, la jeune fille a déclaré avoir été victime de viol et droguée avant les faits. Polanski a alors plaidé coupable devant la justice mais en niant la contrainte donc le viol et le fait de lavoir droguée. Il sest soustrait à la justice américaine en 1978, refusant de remettre les pieds aux Etats-Unis où il risque une très lourde peine de prison pour cet acte imprescriptible outre-Atlantique. Ce qui intéresse la justice américaine apparemment, cest autant la nature de lacte pour lequel la victime (13 ans à lépoque des faits) a finalement retiré sa plainte (après « indemnisation », apparemment), que le fait davoir fuit la justice.
Ce qui minterpelle surtout, cest le traitement médiatique en France qui épousait au moins dans ses premières réactions dans sa grande majorité sans réserves la défense du cinéaste et banalisait du coup le viol sur mineure : la victime, cest Polanski. Les termes employés étaient révélateurs : il était rarement question de viol mais « daffaire de murs », « datteinte sexuelle ». De plus en plus nombreux sont les commentateurs à trouver cette levée de boucliers indécente, notamment parce quun grand nombre de politiciens se positionnent dans une affaire de justice en cours, étant allés apparemment jusquà des « demandes de mise en libération » de la part du gouvernement français.
AgoraVox (http://www.agoravox.fr/tribune-libr…) met en avant le discours du ministre français de la culture, Frédéric Mitterrand : « Si le monde de la culture ne soutenait pas Roman Polanski, ça voudrait dire quil ny a plus de culture dans notre pays. » Pour lui, cest « une histoire ancienne, qui na pas vraiment de sens ».
Dautres « contextualisent » les faits : à lépoque, nous étions encore très marqué par la libération sexuelle, des photos de jeunes filles nues étaient parmi les créations artistiques répandues (Hamilton, par exemple) et quil ny avait pas les mêmes jugements moraux quaujourdhui.
Comme le souligne Clémentine Autin dans son blog (http://clementineautain.fr/), la défense de Polanski se fait au nom de son talent et de sa notoriété. Frédéric Mitterrand le défend parce quil est un « cinéaste de dimension internationale ». La nouvelle directrice générale de lUNESCO, Irina Bukova, a également déclaré : « je ne sais pas le détail mais cest choquant (
) il sagit dune personnalité mondialement connue ». Jack Lang, ancien ministre de la culture de la France, veut que « la liberté soit rendue à ce grand créateur européen ». Les artistes célèbres devraient-ils donc échapper aux règles de droit valables pour le commun des mortels ?
Encore sur Agroa Vox (http://www.agoravox.fr/tribune-libr…), un autre rédacteur commente : « On récuse la justice de classe, mais on nous propose une justice de célébrité. »
Le tout est dautant plus gênant que les membres de la majorité au gouvernement en France ont réussi la pirouette de réclamer dans la même semaine la libération dun violeur en fuite depuis 30 ans (Polanski) et la castration chimique des délinquants sexuels.
En regardant bien ce « fait-divers » autour de larrestation de Polanski, jai bel et bien limpression que les mécanismes de la « masculinité hégémonique » sont manifestes dans ce cas-là aussi. Un viol par un homme zoulou ou un viol par un artiste de renommé internationale – est-ce vraiment si différent dans les traits des masculinités qui y sont sous-jacentes ?
Dans la dernière vague médiatique, le revirement ne cesse de minterpeler : maintenant ce sont les défenseurs de Polanski qui sont les victimes de « lynchage médiatique » par acharnement, notamment des internautes, et on accuse celles et ceux qui partent du principe quun viol est un viol de pudibonderie et dune attitude excessivement moralisante.
Il serait sans doute édifiant si un jour un-e étudiant-e faisait aussi un travail de recherche sur la construction du discours public, lutilisation darguments se référant à la culture et la morale et la mise sur agenda dun problème politique dans la sphère Polanski »…
Bonne lecture ! ]
Elisabeth Hofmann(coordinatrice)
Source genre en action
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» Statut des femmes…triple oppression de race, de classe et de genre « …
Et…Les vieilles : reléguées à l’état de latrines à sperme…Gratuites en plus !
Saletés de sociétés machistes !
En fin de compte, je n’ai pas tout lu, car, comme dans la vrais vie, c’est chacun pour sa peau ,le viol et l’assassinat, font partie des activité naturelles des prédateurs(surtout ceux qui sont au pouvoir) .Donc je ne dis rien .
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