Mois : août 2008
Retour à Athènes. ( fin )
Le Père-Ver Chapitre XII ( Roman publié en 2000 ; épuisé )
CHAPITRE XII
Les fêtes de fin d’année ont passé comme dans un rêve. Les préparatifs de Noël me ravissent toujours. Les présents à choisir à chacun, l’arbre et la maison à décorer avec les enfants. Les paquets cadeaux éventrés le soir du réveillon par des mains impatientes, les exclamations de joie, les…
Visage-Pâle m’ouvre la fameuse porte capitonnée, me ramenant du même coup à une réalité nettement moins euphorique.
L’année nouvelle, ne l’a en rien renouvelé. Pour essayer d’enrayer la machinerie du silence qui pourrait se mettre en route toute seule, dans ma tête, je parle la première. Avant qu’il ne dise « Et alors ? » qu’il prononce sûrement de façon neutre, mais qui me parvient paralysant d’impersonnalité.
– Qu’est-ce que le Père Noël vous a apporté ? lui dis-je.
Tandis qu’il écrit la date sur la fiche quadrillée où il m’étiquette soigneusement, il répond d’une voie glacée, sans me regarder.
– Je ne crois pas que ce soit là le sujet de notre entretien.
Il me cloue le bec. Je continue dans ma tête
– Ben si, justement, je veux parler de Noël ! J’ai même apporté un conte que j’ai écrit il y a une dizaine d’années, le soir d’un réveillon solitaire, que j’avais peur d’affronter en Touraine.
Les feuillets jaunis resteront dans mon sac et les mots dans ma tête, tant pis. C’est quand même curieux qu’il réagisse ainsi à une phrase qui devrait lui sembler, somme toute anodine. Il lui était loisible d’esquiver ma question de façon plus cool. Il aurait pu me demander : « Et vous qu’est-ce qu’il vous a apporté ? » Il m’aurait ainsi renvoyée à moi-même de façon moins expéditive.
– Mais qu’est-ce que tu viens fiche là, me dit Ella, bougonne. Tu ne vois pas qu’il est nul ce type ?
Puis voyant que je suis un peu « perdue » et tristounette, elle se radoucit.
– Raconte-la moi ton histoire, tu veux bien ?
– D’accord, je la connais par cur, écoute . Il était une fois, une petite fille qui habitait une jolie maison taillée dans le roc. Tout autour s’étendaient des prés à l’herbe drue et un peu plus loin se dressait une immense forêt pleine de mystères.
Elle n’avait pas toujours habité là. Elle venait d’un lointain pays de soleil, où l’hiver enneigé ne s’aventure jamais. Elle avait été très malade et ne se souvenait de rien concernant sa vie passée. Elle restait persuadée qu’elle était née depuis quelques mois seulement, dans cette charmante demeure.
Elle demeurait des heures, assise devant la grande cheminée à contempler des images fantastiques qu’elle voyait surgir des flammes. C’est grâce à ces dernières, d’ailleurs, qu’elle avait su, qu’elle venait d’un pays aux deux saisons.
Les flammes lui avaient appris aussi qu’elle avait toujours été une petite fille. Tous les autres enfants grandissaient autour d’elle, sans qu’elle pût en faire de même. Elle n’avait ni parents, ni amis, hormis un petit garçon qui venait souvent rêver avec elle. La maison lui appartenait et il la prêtait à la fillette. À vrai dire, il avait été en quelque sorte obligé de l’accueillir, car il la vit se réveiller devant sa porte, par un beau matin clair. Elle frissonnait, il l’emmena se réchauffer devant la cheminée. Depuis, il ne lui avait pas dit de s’en aller.
Les mois se succédaient et il ne se passait pas de jour sans que son petit ami ne vînt la voir. Ils avaient inventé toutes sortes de jeux. Celui du mot-cadeau par exemple. C’était simple. Ils s’asseyaient devant la cheminée. Il y régnait en permanence une douce chaleur, car les branches mortes de la forêt voisine, préféraient venir y finir leurs jours, plutôt que de pourrir dans le froid et l’humidité, rongées de vers.
Ils étaient donc assis tailleur face-à-face, devant le feu et prononçaient à tour de rôle un mot qu’ils désiraient donner à l’autre. Ce dernier le goûtait, puis un suivant et ceci jusqu’à ce qu’il ait trouvé exactement le goût qu’il désirait. Ils recherchaient ainsi une infinité de saveurs dans une multitude de mots. Ils n’étaient jamais rassasiés.
Mais ils préféraient par-dessus tout le jeu du voyage. Ils s’installaient devant la cheminée et plaçaient entre eux une clochette, comme celle que portent les vaches des Pyrénées. Ils se tenaient les mains. C’était important afin qu’ils ne se perdent pas en chemin. Ils fermaient les yeux et au bout d’un temps plus ou moins long, la clochette se mettait à carillonner, comme si c’était Pâques. Dés qu’elle se taisait, ils ouvraient les yeux et se retrouvaient dans un pays ou un autre, différend à chaque fois.
C’est ainsi qu’ils se rendirent sur les vieux remparts de Saint-Malo, errèrent des heures, dans Londres embrumée à la recherche d’un hôtel, rêvèrent aux pieds de ruines en Espagne …
Parfois, ils décidaient de voyager séparément et à tour de rôle. Il se retrouvait inlassablement à bord d’un voilier fendant une mer immense, et elle errait sans limites sur les plages dorées d’une île déserte.
Les jours avaient fui, l’automne touchait presque à sa fin et elle pensait à Noël à cause des flammes qui ne faisaient qu’en parler depuis quelque temps.
Le feu lui racontait à volonté ses Noëls passés et les Noëls présents, du monde entier. Il suffisait qu’elle fixe les flammes pendant cinq secondes, pour que la magie opère. Alors, apparaissaient des rues illuminées où une foule euphorique dévalisait des magasins aux vitrines ruisselantes de lumière. La solitude avait signé la trêve de Noël : on ne voyait partout que des couples enlacés et des familles heureuses.
La fillette n’avait pas vu son ami depuis quelque temps, quand un soir, il vint à nouveau rêver auprès d’elle. Il lui annonça qu’il serait absent pour Noël, car il était invité chez des copains.
La petite avait entendu, mais pas vraiment réalisé, le sens des propos. Seulement, le lendemain, des images glacées surgirent des flammes brûlantes. Aucun son ne traversait l’épais brouillard recouvrant les rues soudain assombries et désertes. Le cur serré, la fillette n’osa plus se tourner vers la cheminée, ni regarder les flammes. Elle ne supportait pas l’idée d’être toute seule pour Noël .
Elle quitta aussitôt la maisonnette et se dirigea vers la forêt pleine de mystères, où croissait la fougère rousse. Elle se retrouvera sans l’avoir consciemment désiré, devant l’écurie de la jument « Acajou ». Cette coquine rendait enragé plus d’un, car une fois sellée et montée, elle refusait à la manière d’une ânesse bornée, de faire le moindre pas.
Dès leur première rencontre qui remontait à quelque temps, la jument Acajou avait longuement regardé la petite fille, de ses immenses yeux humides et tellement expressifs, avant de frotter vigoureusement le plat de son museau contre le pull marin.
Ce jour-là, la fillette lui tapotait tendrement la joue quand elle l’entendit parler à voix basse.
– Qu’est-ce qui te rend si triste une veille de Noël ? Demanda la jument.
– Mais tu parles ! s’exclama la petite fille.
– Ce n’est pas la première fois, mais tu ne m’entendais pas jusqu’ici, fascinée par la magie des flammes et par la présence de ton petit copain aussi. Mais tu n’as pas répondu à ma question, insista Acajou.
– S’il te plaît, emmène-moi dans la forêt pleine de mystères. Elle est si belle aujourd’hui, demanda la fillette, ignorant la question de la jument.
Sans attendre de réponse, elle roula une botte de paille à côté de la coquine et grimpa sur la selle. La jument redressa fièrement la tête balaya l’air de sa belle queue et s’avança l’air hautain, sans que sa cavalière n’eut à lui donner le plus petit ordre.
Elle prit la direction d’une clairière ou dormait un étang. Une fois arrivée, elle fit la folle dans l’herbe humide et tendre pendant que la fillette se dirigeait vers le miroir assoupi.
Elle s’approcha du bord et se pencha au-dessus de l’onde pour suivre des yeux une grenouille qui y avait fait un plongeon. Elle vit bientôt l’image tremblotante d’une petite fille qui lui souriait avec tendresse. Quand la surface de l’eau redevint lisse et calme, elle s’aperçut que la créature de l’eau lui ressemblait comme deux gouttes d’eau. Elle tendit la main. Sa jumelle la prit dans la sienne et sortit du miroir liquide. Elles se laissèrent tomber sur le sol tendre, s’embrassant à pleines joues, les bras tressant des colliers de caresses. Puis elles se promenèrent longuement, riant et pleurant, se racontant des histoires de gouffres sans fonds et de nuits aux mille et un soleils. Des histoires à dormir debout, les yeux grand ouverts.
– Je suis sûre que tu entends les gens penser, dit la jumelle de l’étang.
– Tout à fait. Souvent je les écoute mentir dans leur tête. Leur bouche sourit et dit le contraire acquiesça la fillette.
– Je sais aussi que tu voyages dans le futur.
– C’est vrai et aussi souvent que je le désire. J’entends ce que l’on ne dit pas, je perçois ce que l’on ne voit pas. Je voyage à travers l’espace et le temps sans bouger du lieu où je me trouve. Je peux communiquer avec certaines plantes et certains animaux. Mais le plus souvent je m’enferme dans une sorte de bulle invisible où jamais personne ne m’atteint.
La nuit tombait. La petite-fille avait perdu sa tristesse, car elle savait désormais, qu’elle ne serait plus jamais seule. Il lui suffirait de le désirer très fort, pour que son amie de l’étang vienne la rejoindre en tout lieu et à toute heure. En réalité, sa jumelle avait toujours existé, mais elle n’en avait pris conscience qu’aujourd’hui, au moment où elle s’est regardée dans le miroir liquide.
La jument Acajou avait regagné ses pénates depuis belle lurette. Depuis que le carillon de l’écurie, annonçant le souper, avait retenti jusque dans son estomac.
La fillette et son double s’embrassèrent tendrement, avant de se séparer momentanément. La première, regarda son amie grimper tout en haut d’un pin, où l’appelait un vieil écureuil qui détestait jouer seul à casse-noisettes . Puis elle prit d’un cur léger, le chemin du retour inondé de la clarté d’une lune généreuse. Elle réchauffa dans sa poche un petit champignon solitaire qui frissonnait et rencontra une vieille chouette qui prenait l’air sur le pas de son arbre. Elle haussa les épaules tout en levant les yeux au ciel quand elle vit la fillette sauter à cloche-pied dans le sentier couvert d’un tapis de mousse. Cette dernière ne put s’empêcher de sourire car l’oiseau avait les mimiques de son aïeule quand celle-ci la regardait, autrefois, rentrer de l’école en zigzaguant du trottoir sur la chaussée et vice versa . C’étaient les flammes qui lui avaient raconté sa Mère- Grand de cette façon.
La petite fille se retrouva en un rien de temps devant la porte de la petite maison et faillit se cogner à une vieille et grosse branche qui se traînait péniblement vers sa dernière chaleur. Elle l’aida à franchir les quelques mètres qui la séparaient de la grande cheminée. La bûche à bout de souffle, ne tarda pas à ronfler de plaisir.
La fillette s’installa sans perdre une minute devant l’âtre et osa regarder les flammes de tous ses yeux, ceux du dehors et celui du dedans. Celui qui entend mentir et ceux qui perçoivent les infimes nuances de l’arc-en-ciel. Aussitôt, défilèrent à nouveau, d’innombrables vitrines illuminées et bondées où sagglutinaient des gens heureux. Ce soir-là, la petite fille s’endormit profondément, la tête dans les étoiles.
Le lendemain, en fin d’après-midi, assise à sa place préférée, elle posa la clochette devant elle et ferma les yeux très fort. Quelques secondes plus tard, le tintement résonna plus clair, plus joyeux et plus insistant que d’habitude. Elle ouvrit les paupières et se retrouva, toute étonnée, dans une pièce qu’elle ne connaissait pas.
– Elle courut à la fenêtre et vit une rue brillamment éclairée, enveloppée d’une légère écharpe de brume. Des gens emmitouflés dans de chauds manteaux se pressaient tout en échangeant des souhaits : Merry Christmas !
Elle se retourna et fit des yeux, le tour de la pièce. Une fausse peau de zèbre toute moelleuse ainsi que des coussins tendres et soyeux, couleur de bonbons acidulés, égayaient un lourd tapis d’orient .
La fillette s’engouffra dans un vaste manteau suspendu derrière la porte d’entrée. Elle se précipita dans la rue pour aller faire pleins d’achats, en compagnie de sa petite amie de l’étang, venue la rejoindre selon son vu.
Elles rentrèrent quelques instants plus tard joyeuses et volubiles, croulant sous le poids de nombreux paquets.
Pendant que son double grignotait des chocolats fourrés et des marrons glacés, assis tailleur sur la fausse fourrure, la petite s’affaira.
Elle disposa d’odorantes roses rouges dans un grand vase noir qu’elle plaça sur un coin du tapis.
Elle installa l’arbre de Noël au milieu de la pièce et se délecta un long moment à le décorer. Elle n’oublia pas d’y accrocher de vrais petits glaçons et de le saupoudrer de vrai givre, qui avaient accepté de ne pas fondre l’espace d’une nuit. Elle pensa aussi à accrocher l’étoile étincelante au sommet du sapin et disposa les cadeaux à son pied.
Ensuite vint le moment de construire la crèche. Elle n’était contaminée par aucune religion, mais la naissance d’un bébé ne pouvait la laisser indifférente. Elle posa la boîte de carton qui avait contenu les guirlandes, contre le mur. Tout autour elle disposa du papier d’emballage froissé et modela une sorte de rocher creusé d’une grotte. Elle piqua des petites branches de sapin dans le « roc » pour simuler la végétation et plaça les personnages légendaires ; les bergers et les moutons en haut du rocher, les Rois Mages à l’entrée de la grotte, le papa et la maman encadrant le petit. Elle pouvait le poser dès maintenant sur sa couche, faite de paille d’emballage, car il était minuit. Elle accrocha enfin l’étoile tout en haut, pour que d’autres bergers puissent aussi repérer l’endroit et venir admirer le nouveau-né.
La fillette regardait ravie, son ouvrage, quand elle vit le bébé frissonner. Elle resta indécise une seconde, puis s’aperçut qu’elle avait oublié de placer l’âne et le buf. Elle répara aussitôt son oubli et bientôt, réchauffé par le souffle tiède des deux animaux, le tout-petit bailla , ferma les paupières et s’endormit.
La petite fille se releva. Elle ressentit un vrai bonheur à contempler l’arbre si joliment paré, les roses qui éclaboussaient le mur de taches éclatantes, la crèche où somnolait le petit Noël et enfin, son amie endormie dans la fourrure.
Elle s’arracha à sa contemplation, enfila une nouvelle fois son manteau et ses bottes, ouvrit et referma sans bruit la porte d’entrée et se dirigea vers la cathédrale toute proche. L’église semblait sur le point de craquer sous le poids de la foule, des lumières et des chants sacrés. La fillette éprouva un véritable enchantement à écouter les orgues puissantes qui faisaient vibrer les vieilles pierres.
Faisant fi du temps et de l’espace ,elle se retrouva un moment, au cur des étoiles, évoluant dans la musique du cosmos, convaincue qu’elle ne serait plus jamais seule.
– Ce sera tout pour aujourd’hui dit Visage-Pâle, me ramenant brutalement sur terre.
Qu’a-t-il fait pendant ces vingt minutes ? Toute occupée à raconter mon histoire de Noël à Ella , j’avais complètement oublié sa présence.
( A suivre…)
Mykonos : une ambiance à nulle autre pareille, dans des petites ruelles; bleu, blanc…bougainvillées ! et on recommence…
Une maxime bouddhiste dit : » Le passé ne t’appartient plus, vis aujourd’hui, car c’ est le rêve de demain. »
Alors…Mykonos demeurera un rêve magnifique !
Sans transition:
Le Canard Enchaîné,( abandonné par un touriste) :[ Poker frimeur.
« L’Hebdo » suisse (31 / 7) consacre un dossier au poker et interroge la championne du monde, l’Allemande Kadja Thater, qui se moque des tables masculines : » Qui fait le plus grand tas, qui pisse le plus loin, voilà à quoi se résume le jeu entre mecs. Qui a la queue la plus longue est tout ce qui compte. »
Et, pourtant, il y en a qui gagnent parfois avec une seule paire! ]
No comment !
Fleurs…artificielles !
Comment adapter son environnement à soi !
Oui, ceux-là doivent être « rafraîchis » !
Bougeant entre la Réunion, Maurice, l’Ardèche et les voyages, il m’est impossible d’avoir des fleurs devant la case d’Ardèche. Depuis des années j’y plante des fleurs… artificielles: hortensias bleus, géraniums, renoncules, rosiers nains, marguerites et j’en passe …
C’est plus gai et des voleurs de passage pensent que c’est une maison habitée.
Il y aura une éclipse de Tingy, car elle va voir chez les grecs si elle y est .
A bientôt…si vous le voulez bien !
Chapitre XI du roman le Père-Ver
( Eventuellement, reconstituer l’ouvrage en faisant un « copier/coller » de tous les chapitres, une fois le dernier paru . )
Chapitre XI
– Cela va faire bientôt un an que lon se voit, me dit Visage-Pâle en guise de bienvenue.
Il est toujours aussi hermétique et moi je suis un peu surprise. À mon avis, il commence à baliser mon départ. Tout compte fait, je le comprends. Mais je nai pas terminé, moi, il faudra que je me dépêche. Je suis venue maintes fois, sans desserrer les dents, pendant vingt longues minutes et voilà quil va me manquer de temps maintenant. Bon, il faudra faire avec. Je me jette à leau sans plus attendre.
– Jai fait un rêve fantastique, qui je le crains, ne vous ferait pas hurler de plaisir si je vous le racontais.
Du coup, cest moi qui ris dans ma tête, en visualisant Visage-Pâle « hurlant de plaisir » ; ah ! Cest trop !
– Dans la rêverie matinale qui a suivi ce songe, je suis tombée sur un épisode de ma vie, assez singulier : celui où je faisais du stop, poursuis-je. Javais les moyens de payer mes déplacements entre Paris, Tours ou Rouen, mais une obscure raison me poussait à lever le pouce.
Cela a commencé un samedi matin, au mois daoût. Au hasard dune balade, jentre dans un PMU de la Porte de Versailles. Jai envie dapprocher le monde des parieurs, pour essayer de comprendre cet engouement.
Ce jour-là et celui daprès, Ekseption doit rencontrer seul, sa mère, venue de lîle Aux-Trois-Lagons pour un bref séjour. Nous avons convenu de nous retrouver, lui et moi, dans la soirée de dimanche chez une amie commune.
Dans la salle bondée et enfumée du PMU, des parieurs remplissent leurs bulletins en saidant le plus souvent, de journaux spécialisés étalés devant eux.
– Je peux ? dis-je à une nana aux longs cheveux noirs, plus très jeune, absorbée à cocher des petites cases.
En guise de réponse, elle libère un coin de table, tout en continuant son occupation.
Je commande un thé et mamuse à scruter les nombreux acteurs de cette scène ordinaire de bistrot.
– Tu ne joues pas ? demande soudain la nana.
– Si tu veux bien maider, je me lance, lui dis-je avec sourire amusé.
– Tas jamais parié aux courses ? Cest bien vrai ? Tiens, regarde ce nest pas difficile, dit-elle.
Joignant le geste à la parole, elle maide à remplir deux bulletins. Elle se lève bientôt.
– Il faut que je me sauve maintenant. Le samedi, je nai personne pour garder ma vieille mère. Salut !
Elle sadresse à deux gaillards qui cherchent, des yeux, une place libre.
– Tenez, si vous voulez, la place est encore chaude.
Elle séloigne après un dernier signe amical de la main.
– Vous permettez. ?
Jacquiesce. Ils se présentent. Deux kinés désireux détancher une petite soif, avant de reprendre la route en direction du circuit des Essarts. Ils comptent participer à une petite course de voitures qui précède celle des Formule 1.
Ils commandent des boissons fraîches et nous échangeons des propos anodins.
– Pourquoi ne viendriez-vous pas avec nous, puisque vous êtes libre jusquà demain soir, demande le plus grand des deux. Ce serait loccasion de côtoyer le milieu de la course automobile.
– Pourquoi pas ? dis-je, après une courte hésitation.
Nous convenons de nous retrouver deux heures plus tard, devant le PMU. Ils ont diverses choses à régler. Quant à moi, je désire informer ma copine, de mon escapade imprévue, au cas où Ekseption rentrerait le premier, afin quil ne sinquiète pas.
Deux heures plus tard, nous roulons vers Rouen. À midi, nous faisons halte dans une petite auberge.
Nous parlons de choses et dautres, quand le plus petit des deux minterpelle tout à trac.
– Dis donc, ça pourrait savérer dangereux pour toi de faire du stop. Tu pourrais tomber sur un malade. Après tout, tu ne nous connais pas.
– Si tu as lintention de me violer, il faudra aussi te débarrasser de moi après, car tu ne seras plus en sécurité nulle part, dis-je, en le regardant droit dans les yeux.
– Quest-ce qui te prend ? dit le grand, irrité.
– Oh ! Si on ne peut plus déconner, maintenant ! répond son copain gêné.
Le week-end se passe merveilleusement bien, mais la « petite phrase » fait son trou dans un coin de ma cervelle. À partir de ce jour, je multiplie les occasions de faire du stop.
Dès la semaine suivante, je me dirige vers la Porte de Versailles. Jattends depuis à peine cinq minutes, quand un jeune homme au volant dune voiture bleue, fatiguée, sarrête à ma hauteur. Il me demande où je vais. Je le renseigne.
– Montez, cest sur mon chemin, dit-il sans aucune assurance dans la voix.
Je sais quil ment. Il roule à petite allure, un peu indécis. Il tourne en rond, au hasard des petites routes de campagne, quil me désigne comme étant des raccourcis. Le jour commence à baisser. Je ne sais pas du tout où nous sommes. Au bout dun long moment, il finit par entrer dans un chemin de terre.
– Où est-ce que vous allez, dis-je ?
– Je veux faire lamour avec vous, répond-il en stoppant la voiture.
– Ca, cest la meilleure que jai entendue depuis longtemps ! Mais moi, je nen ai aucune envie, mais alors là, aucune. Tas des problèmes avec ta mère ? Cest ça hein ?
– Tas pas le choix, sinon je te laisse là et je fous le camp avec la voiture.
– OK et moi je porte plainte contre toi. Tu pourrais aussi me violer et pourquoi pas me tuer après. Et ce nest pas aussi facile que tu pourrais limaginer.
Il prend peur. Sa mâchoire se crispe. Il fait demi-tour dans un nuage de poussière. La nuit est tombée. Au bout dun quart dheure, la voiture hoquette et le conducteur a juste le temps de la garer sur le bas-côté.
– On est en panne dessence et je nai pas de tune, dit-il gêné.
Je descends de la voiture et méloigne à tâtons dans la nuit noire, en prenant la direction opposée.
Au bout dun moment, une voiture arrive à vive allure. Je fais de grands gestes. Elle stoppe à ma hauteur. Une gueule énorme jaillit par la fenêtre de la portière, en aboyant furieusement.
– Sultan, couché ! dit le conducteur qui se penche légèrement afin de mobserver.
Je raconte brièvement ce qui marrive.
-Je peux vous déposer à la gare du prochain patelin, propose-t-il en ouvrant la portière.
Il roule à vive allure, pendant que les « Sixties » se déchaînent sur son lecteur de cassettes. Cest quand il séloigne de la gare, où il ma laissée, que je me rends compte que jai roulé en Porsche.
Une autre fois, cest une camionnette qui me prend en stop. Une demi-heure plus tard, le chauffeur me propose une partie de jambes en lair. Je lui explique que je suis lesbienne et que les hommes me dégoûtent. Il me regarde très émoustillé.
– Cela na aucune importance, tas quà te laisser faire, insiste-t-il.
– Tenez, laissez-moi ici, dis-je, en désignant la bretelle daccès dune station-service.
Il hésite un moment. Jouvre la portière. Il freine aussitôt. Je pense quil sait que je vais sauter.
La fois daprès, cest un routier qui me propose de memmener. Le chauffeur me dévisage de la tête aux bottes en passant par mon chemisier écossais à manches longues et mon jean roulé du bas. Il a la tête et lallure que je prête à Van Gogh en période de crise. Cest-à-dire les cheveux roux, les yeux fous et le visage animé de tics nerveux. Si javais lintention de faire peur pendant deux cents kilomètres, cest bien parti pour. Il met en marche sa grosse machine, quand jouvre la portière.
– Deux secondes, sil vous plaît. Je dois passer un coup de fil de la cabine den face, dis-je en évitant de le regarder
Nous voilà partis. Il monologue sur tout et sur rien pendant un bon moment.
Jacquiesce de temps à autre, par politesse. Tout à coup, sa conversation prend un tour plus précis. Il se met à raconter ses exploits sexuels. Comme dit la chanson : « même un enfant ne le croirait pas. »
– La dernière fois, jai pris en stop deux filles. Au bout dune demi-heure, jai dû stopper le camion.
Elles se sont jetées sur moi et on a fait lamour comme des bêtes, là, dit-il en désignant derrière son siège, un couchage à demi caché par un rideau sale.
La nuit tombe. Dans la lumière des phares, il avise un panneau indiquant une aire de repos.
– Et si je stoppais là, on pourrait samuser un peu ?
– Cest non ! dis-je catégorique. Vous navez quà me laisser là et vous en aller.
– Et si je te sautais quand même ?
– Cest ça, et pourquoi pas me tuer ensuite, pour éviter la prison ?
– Tas raison, pourquoi pas ? dit-il, en ricanant bêtement.
– Eh bien vas-y ! Ne te gêne pas ! Tu te souviens que jai téléphoné avant le départ ? Jai refilé le numéro de ton camion à ma copine, que je dois dailleurs rappeler à mon arrivée.
-Je me demande ce qui me retient de te foutre une branlée, dit-il, en bégayant de rage.
Le conducteur se renfrogne sur son siège. Il conduit à vive allure sous la pluie qui gicle des nombreuses roues du semi-remorque. Enfin on arrive. Il stoppe devant un Routier à lentrée de la ville. Un concert de sifflets nous accueille. Le chauffeur demande une bière et moi le téléphone. Ekseption est heureux dentendre le son de ma voix. Cest réciproque. Il vient me chercher. Le routier ne saura jamais, que je nai téléphoné à personne avant notre départ de Paris.
Il y a aussi cette fois où jai fait du stop en pleine ville, sur le boulevard, en face de la piscine de Rouen, pour aller à Paris. Une voiture sarrête aussitôt. Elle démarre à peine, quand le conducteur sans dire un mot, pose la main sur ma cuisse recouverte de mon jean. Sans un mot, jouvre grand la portière et sors mes jambes dans le vide, mapprêtant à sauter. Il freine brutalement. Je descends. Il redémarre un peu « secoué », dans un concert de klaxons et sous les quolibets de ceux qui le dépassent.
Je regarde Visage-Pâle, qui semble intéressé par mes propos.
– Vous pensez sûrement que je voulais me faire sauter, lui dis-je.
– Cest évident, répond-il, sans lombre dune hésitation.
– Eh bien, vous avez tout faux. Si cela avait été le cas, je serais montée tout bonnement dans une chambre dhôtel. En réalité, cest comme si jorganisais à chaque fois, une sorte de combat de coqs dans une toute petite arène et sans spectateur. Arène où la violence et peut-être la mort pouvaient surgir réellement. Jen suis toujours sortie gagnante, morte de trouille, mais « vainqueuse ». Vous avez remarqué quil ny a pas de féminin à vainqueur alors quil y en a à vaincu. Bref, javais perdu contre deux hommes, M. Hef, mon géniteur et Brutus, le mari violent ; javais décidé de « gagner » contre tous les autres. Je ne sais pas ce qui a mis fin à ce comportement un peu suicidaire tout de même. Peut-être, la certitude acquise à un moment donné, que je saurais me défendre désormais contre « EUX ».
Visage-Pâle lorgne son petit réveil. Je lui tends son chèque déjà rempli.
Il faut que je précise, qu’ Ekseption na jamais fait la moindre allusion à mon étrange comportement. A lépoque, je ne comprenais rien non plus à ma démarche. Jobéissais tout simplement à des pulsions concoctées par mon inconscient, un peu comme je lavais fait quand javais épousé Brutus.
Inutile de préciser que, désormais, je me sens incapable de faire à nouveau du stop, pour quelque raison que ce soit.
Fin du chapitre.
Sois pute et tais-toi !
Ce courriel est envoyé aux membres du réseau « Encore féministes ! »
Voici une lettre que j’adresse, au nom de notre réseau, au responsable d’un quotidien français. Il s’agit d’une réaction à un article sur une affaire de viol aggravé, qui tend à rejeter la faute sur la victime.
>Je vous invite à vous inspirer de ce texte (ou à en reprendre des passages), et à écrire, vous aussi, une lettre, moyen plus efficace que le courriel.
Les " attrapères"…ou démonstration de virilité, brute de décoffrage…
Sans rapport avec la photo, comment reconnaît-on, entre autres, un macho :
– Il ne manque AUCUNE occasion de faire une « blague » ( ! )sexiste ou machiste ou carrément misogyne. Mais rit « jaune » quand on la « détourne » , pour en faire une blague « casse-mec » .
– Il n’ est pas au courant, que le machisme tue tous les jours, alors que le féminisme n’a jamais tué personne.
– Il préférerait perdre sa voiture customisée, plutôt que s’afficher sur un site féministe; pour lui, féministe=lesbienne frustrée.
– Il n’admet pas que le couple soit une société où les deux actionnaires sont à 50/50 ;en définitive, même s’il accepte d’en discuter, c’est LUI qui décide, LUI qui a raison, LUI qui se considère comme le « chef » de famille détenant l’autorité.
– Il ADOOORRRE les femmes; enfin, leur sexe, mais a un appétit exagérément modéré ou franchement nul pour les travaux ménagers.
– Il fait semblant de ne pas savoir, que les féministes ont de l’estime et du respect pour les hommes tendres, respectueux d’eux-mêmes et des femmes, et qui ne portent pas leur virilité en bandoulière.