Marie termine un nu. Assise sur la moquette brun-chaud, d’une petite maison perdue dans la campagne de Chinon, elle peint sa propre nudité au propre et au figuré, reflétée dans un battant de porte, entièrement vitré. Les genoux repliés , elle prend appui sur sa main gauche, pendant que la droite capte peu à peu sa silhouette, par d’épaisses couches de peinture au couteau, déposées à la hâte, sur une toile reposant à même le sol.
Quelques minutes plus tôt, un groupe de motards arrivé à grands bruits, s’est interrogé pour savoir ce qu’il décidait quand à la suite à donner à sa virée nocturne…Il avait emprunté le chemin de terre conduisant au « Château de Basse » aujourd’hui disparu, et se terminant en cul-de-sac devant la petite dépendance encore debout, avant de repartir dans la nuit étoilée.
Marie n’éprouve aucune frayeur, quand à sa solitude dans ce coin perdu : Il ne peut rien lui arriver de pire que ce qu’elle a déjà subi, de la part du type qui a saccagé sa vie pendant treize ans.
La radio déverse doucement son programme. Une belle voix rauque de femme, accompagnée de quelques notes de piano et surgie de la nuit très avancée, lui propose de la retrouver, pour des confidences…Elle n’a rien à raconter: tout est enterré dans le coffre-fort de son passé. Mais elle est happée par tous ces destins inconnus et si proches, murmurant le plus souvent, des histoires mélancoliques de chômeurs, de femmes larguées, d’étudiants peu friqués…
Macha les a emportées , avec elle, la nuit dernière…pour les raconter aux anges, afin qu’ils intercèdent auprès du Bon Dieu, pour qu’il répande sur Terre une averse mondiale de tendresse, d’espoir, de paix, de tolérance et de respect.
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Adieu Macha !
