(Photo: la liberté sent la lavande)
Sonia – 20 juillet 2010, à 20:50
» J’ai suivi les conseils que vous m’aviez donné au sujet de ma vie. Je vous en parlerai.
Nous allons bien merci, demain 21 nous allons à la Réunion, mais il y a la grève. Alors on est dans l’attente.
Félicitation pour les enfants, la famille s’agrandit. De mon côté, j’ai marié mon 2ème fils fin juin (ils ont déjà 2 filles).
Contente d’avoir eu de vos nouvelles. Amandine est une grande jeune fille maintenant.
Amandine et moi pensons bien à vous.
Sonia. »
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Sonia m’a retrouvée sur facebook et adressé ce message, il y a quelques jours.
Sonia était mon ancienne « nénène ». En général, à la Réunion, une femme de ménage est une…Bonne(!) Une nénène c’est autre chose: les deux familles, celle de l’employeur et celle de l’employée sont… »liées » affectivement, au fil du temps.
Bref, elle était à cette époque dans l’enfer conjugal. Ses trois fils flirtaient avec la petite délinquance. Elle les a inscrits au judo, pour qu’ils puissent défouler leur haine des violences paternelles et leur frustrations dues aux injustices sociales. Ils ont été champion départemental, dans leur catégorie. Mais les mauvaises fréquentations ne lâchaient pas prise. Cette mère courage s’est battue seule avec les assistantes sociales; elle a harcelé le juge des enfants. Elle a enfin réussi à obtenir leur placement dans des centres d’éducation et de formation en…France métropolitaine. Aujourd’hui ils ont une vie heureuse et sans histoires.
La haine du mari ne baissait pas sa garde non plus. Un jour, il a voulu massacrer Sonia à coups de…hache! Elle a fui, la nuit, dans la rue avec sa fille âgée de 7/8 ans. Elle s’est réfugiée momentanément dans un commissariat de Police où elle a porté plainte. Elle a déposé la petite à l’école le lendemain et elle est venue travailler chez moi, (entre autres), comme d’habitude. Enfin presque! Je connaissais trop les stigmates de la violence conjugale pour ne pas réaliser qu’elle traversait l’enfer, elle aussi!
Elle m’a tout raconté. Comme on devait prendre l’avion le jour suivant, pour passer les grandes vacances à l’étranger, je lui ai proposé de venir habiter chez nous, tout le temps qu’il lui faudrait. Il y avait des conserves et aussi des surgelés dans le frigo. J’ai toujours eu peur de manquer…
Et j’ai emmené Amandine se choisir deux tenues complètes, dans une chouette boutique pour enfants: je voulais alléger sa peine…Je me souvenais de la mienne, insondable, quand un grand camion a avalé nos meubles et emporté loin de notre maison…ma mère, ma soeur aînée, mon jeune frère et ma petite soeur…Laissant sur le carreau, incrédules et désemparés, mon frère aîné, mon cadet et moi-même…que notre père conduisit chez une dame âgée, notre grand-mère. Personne ne nous avait rien expliqué, ni les insoutenables et journalières scènes de violences, ni la séparation : le chaos…
Bref, bref! Sonia est allée s’installer en France métropolitaine avec sa fille, grâce à l’aide d’un organisme qui aide pour l’emploi… Une amie l’a hébergée à sa descente d’avion…Trois mois plus tard, elle a accepté un job dur dans un hospice, elle habite un appart sympa et conduit sa voiture. Elle a aussi di-vor-cé !
…Elle a même rencontré un amoureux, d’après son amie restée à la Réunion et qui est devenue ma nouvelle nénène. Mais Sonia disait ne plus vouloir se remarier !!! On la comprend…
» J’ai suivi les conseils* que vous m’aviez donné au sujet de ma vie »…dit Sonia.
Je ne m’en* rappelle pas. Je me souviens seulement de son immense peine et de son désarroi…
» Je vous en* parlerai « …dit aussi Sonia.
Je vous tiendrai au courant, c’est promis !