(fusain et pastel gras)
[ Mieux gérer son agressivité permet de libérer le désirTrop dagressivité nuit au désir. Ravaler sa colère aussi. Trouver le juste équilibre, cest ce que propose la thérapeute Brigitte Martel.
Directrice adjointe de lEcole parisienne de Gestalt, elle sest spécialisée dans laccompagnement des problématiques sexuelles.
« Pour moi, la question de lagressivité est devenue un fil conducteur pour comprendre les baisses de désir sexuel et proposer des pistes de travail. Frederik S. Perls, le fondateur de la Gestalt, parlait dune « saine agressivité » : celle du bébé qui crie et mord pour se nourrir, celle qui donne envie aussi de « mordre » la vie à pleines dents.
Labsence de désir sexuel est souvent liée à une mauvaise gestion de cette agressivité. Une de mes patientes sinquiétait de ne plus ressentir de désir pour son mari. Je lui ai proposé dimaginer son problème résolu, je lai encouragée à se ressentir « désirante », pleine dappétit sexuel Elle se bloquait, prenait lair sévère. Elle a fini par me dire : « Cest bizarre, je ny arrive pas, pourtant, cest ce que je veux » Jusquà lâcher en criant : « Ah, non, il ne mérite pas ça ! » Sa voix sétait durcie, son corps se bloquait. Peu à peu, en parlant avec moi, elle vint à réaliser que son manque de désir était une manière détournée de dire à son compagnon combien elle lui en voulait. Cette agressivité quelle ne pouvait exprimer sétait accumulée, elle lui nuisait mais, en même temps, elle la dégageait de toute responsabilité : « Si je me mets en colère contre lui, je suis responsable, alors que si je nai pas de désir, ce nest pas ma faute »
Ici, nous avions affaire à une agressivité déviée. Il y a aussi beaucoup de cas « dhypoagressivité », typique de ceux qui nosent pas saffirmer. Souvent, les injonctions entendues dans lenfance ont façonné leur corps. Ceux à qui on a répété : « Ne bouge pas comme ça ! », vivent avec un bassin rigide, bloqué. Ils ne sautorisent pas à éprouver du désir. A linverse, ceux qui ont une agressivité débordante, les hyperagressifs, ont du mal à canaliser leur désir. Parmi eux, il y a ces hommes dont les femmes se plaignent : « Il me saute tout de suite dessus. » Quand on regarde le manque de désir sous ce prisme-là, on fait avancer la thérapie. Pour beaucoup de patients, il va sagir de retrouver, de façon admise et cadrée, une bonne circulation de leur agressivité. Grâce aux fantasmes, par exemple. En groupe, ou lors de rêves éveillés, je leur propose dexplorer les images fantasmatiques qui leur viennent spontanément. Dans la plupart de ces films érotiques intérieurs, lagressivité est présente : beaucoup parlent de soumission, de domination Le traitement consiste à permettre à la personne de se « balader » dans son désir tout en comprenant quelle nest pas obligée de passer à lacte. Fantasmer, cela permet de récupérer et refaire circuler une agressivité que lon nagira pas. Cest une vraie révélation pour beaucoup de patients. Je pense à cet homme qui se plaignait de ne plus désirer sa compagne. Peu à peu, il mavoua quil sétait interdit de regarder les autres femmes. Il nosait pas fantasmer. Résultat, il avait éteint tout appétit en lui. Pouvoir jouer avec sa vie fantasmatique permet de réguler son agressivité.
Selon moi, la bonne santé sexuelle repose sur la fluidité entre tendresse et agressivité. La première est souvent invoquée, la seconde, oubliée. Or, cest aussi en acceptant et en valorisant son pôle agressif que le pôle « tendresse » dune personne pourra prendre toute sa valeur dans la relation sexuelle. » ]
Pascale Senk
Source Psychologies.
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« la bonne santé sexuelle repose sur la fluidité entre tendresse et agressivité »…