"l’éducation sexuelle se fait à travers la pornographie."

Par Jocelyne Robert -Sexologue:

… » Tout ceci est encouragé par la dictature du porno. C’est en partie à cause des films X que le sexe est en mal d’amour. Avant, on devait sensibiliser les gens à la sexualité, maintenant, on doit les désensibiliser à de faux modèles, car l’éducation sexuelle se fait à travers la pornographie.

Mon rôle, entre autres, est de faire comprendre aux gens que le désir et la relation sont plus importants que la performance. Je tente aussi de mettre fin aux idées reçues : j’explique aux hommes qui croient que la fellation permettent aux femmes d’atteindre le nirvana, que le clitoris ne se trouve pas au fond de la gorge !

Il mettait des pinces à linge sur ses testicules

Si la pornodépendance est de plus en plus fréquente, les tabous autour de la sexualité sont aussi très présents.

Je me souviens de cette dame de 78 ans qui m’avait écrit parce qu’elle se sentait incomprise : son mari venait de mourir et ils avaient pour habitude de faire l’amour cinq à six fois par jour. Elle était donc en manque et essayait de se satisfaire elle-même, mais m’expliquait qu’elle n’était pas comblée. Elle m’a dit une phrase qui m’a marquée :

« C’était comme si mon clitoris faisait ‘Toc toc’ en permanence. C’est insupportable ».

En réalité, elle cherchait un amant. Elle avait évoqué le sujet avec son médecin traitant, qui n’avait pas hésité à la juger. Le fait que les personnes âgées aient des désirs et des besoins choque encore, alors que c’est tout à fait normal !

Chaque personne est unique. Chaque histoire est unique.

Parfois, ça va plus loin. Un jour, un homme âgé, très puritain, s’est confié à moi et m’a expliqué que la nuit, il accrochait des pinces à linges sur ses testicules, afin de souffrir, et de ne pas pouvoir se masturber. Pour lui, le sexe, c’était le mal incarné.

On m’a traité de « pédocriminelle »

Le tabou autour de la sexualité aide à comprendre pourquoi la loi sur le mariage pour tous et les rumeurs autour de la théorie du genre ont provoqué un tel tollé en France.

J’ai moi-même écrit plusieurs livres, dont un sur la sexualité des tout-petits, intitulé « Ma sexualité de 0 à 6 ans » et j’ai reçu un mail incendiaire provenant d’un Français. Il me disait que j’étais une pédocriminelle. Il y a une réelle incompréhension autour de ces sujets. Comme si éduquer à la sexualité équivalait à encourager la précocité.

L’homosexualité reste encore un tabou. Un jour, un homme riche et très connu au Québec, est venu se confier à moi. Il m’a dit :

« Mon fils vient de faire son coming-out. Ça coûtera ce que ça coûtera, mais je veux que vous le transformiez ».

Je lui ai expliqué qu’il avait certainement plus besoin d’aide que son enfant.

Un homme s’est exhibé devant moi

Dans certains cas, il ne faut pas hésiter à être ferme, afin de remettre les choses à leur place.

Il m’est arrivé qu’un adolescent de 16 ans me fasse part de son envie de vivre une expérience avec moi. Je ne me suis pas braquée, je lui ai simplement expliqué pourquoi ce n’était pas possible et pourquoi ça ne le serait jamais.

Par contre, quand ça dépasse les limites, il faut être intraitable. Lorsque j’étais une jeune sexologue, un homme qui me demandait une consultation s’est exhibé devant moi. J’ai simplement ouvert la porte et je lui ai ordonné de partir.

Je ne m’implique jamais trop

Il n’est donc pas toujours évident d’entrer dans l’intimité des gens. Il faut avoir de l’aplomb et aller au-delà de tout jugement.

J’ai le souvenir d’un homme qui ne parvenait à s’érotiser qu’à travers des vêtements de bébé. Il était vu comme un monstre et pourtant, il n’avait rien d’un pédophile. Il avait vu sa mère mourir dans un accident, alors qu’elle venait d’acheter des layettes. Ce genre de cas complexe est bouleversant.

J’ai aussi rencontré une dame d’une soixantaine d’années qui m’a raconté que son mari ramenait parfois des prostituées au domicile conjugal. Il attachait son épouse à une chaise, et couchait avec ces femmes devant elle, tout en l’insultant.

Cette histoire m’a marquée, mais il ne faut jamais trop s’impliquer, pour ne pas que ça déteigne sur notre propre vie et pour pouvoir aider au mieux les personnes qui en ont besoin.

J’aide les autres à se reconstruire

J’ai souvent des nouvelles des gens que j’ai accompagnés. Il n’y a pas longtemps, j’ai croisé par hasard une jeune femme qui avait été victime d’abus sexuels durant son enfance.

Elle avait une estime d’elle-même proche de zéro et je l’ai aidée à se reconstruire. Quand elle m’a revue, elle m’a sauté dans les bras.

Prendre conscience qu’on a aidé des personnes à être plus heureuses, mieux dans leur peau, dans leur cœur et dans leurs relations avec les autres, c’est très gratifiant.  » (Extrait).

http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1197706-diktat-du-porno-clitoris-au-fond-de-la-gorge-et-exhibition-vis-ma-vie-de-sexologue.html?cm_mmc=EMV-_-NO-_-20140509_NLNOACTU08H-_-je-suis-sexologue-avec-les-films-x-le-sexe-est-en-mal-d-amour

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… » Tout ceci est encouragé par la dictature du porno. C’est en partie à cause des films X que le sexe est en mal d’amour. Avant, on devait sensibiliser les gens à la sexualité, maintenant, on doit les désensibiliser à de faux modèles, car l’éducation sexuelle se fait à travers la pornographie. »

On devrait dire et écrire, maintenant: « Faire le sexe » et non pas faire l’amour  » ? ? ?