Par Aude Lorriaux
… »«Bizarrement, les blagues de cul, on ne les fait quaux femmes»
A lorigine de ce sexisme relatif, il y a sans doute aussi des raisons liées à la nature même de la profession. Elle suppose en effet une exposition à la nudité, qui favoriserait une sexualité plus «débridée». «Nos chansons pendant les week-ends dintégration, cest que du cul! On a une barrière du corps très différente, parce quon est confronté à des gens nus en permanence», analyse Pauline. Un contexte de désinhibition qui semble par ailleurs plutôt favorisé, ou du moins pas vraiment freiné, par lorganisation des hôpitaux, qui ne disposent bien souvent pas de vestiaires hommes et femmes séparés. «On se déshabille tous dans la même salle avant daller au bloc», fait remarquer Mélanie Marquet.
«Les soirées de médecine sont assez connues pour être les plus trashs. Les filles finissent à moitié à poil et les hommes aussi. Ça boit beaucoup plus et ça couche beaucoup plus. Jai fait des soirées décoles dingénieurs et de commerce et jai pu constater que ce nétait pas du tout la même ambiance. Et quand des ingénieurs et des étudiants de commerce sont venus à nos soirées, ils étaient assez choqués», confirme Pauline.
Une sexualité plus affirmée et sans tabou nest certes pas synonyme de sexisme, les filles des salles de garde dinterne sont dailleurs souvent aussi «trashs» que leurs collègues garçons.
«Ces notions ne sont pas superposées, mais articulées», résume Vincent Barras. Car dans un contexte social où il est beaucoup plus difficile aux femmes quaux hommes daligner des blagues cochonnes sans être regardées de travers, celles-ci se taisent le plus souvent. «Bizarrement, les blagues de cul, on ne les fait quaux femmes. Alors que bizarrement les chefs femmes ne font pas de blagues sexuelles, elles se tiennent», sinsurge Sophie. Face aux paillardises affichées sans complexe et parfois sans respect, les femmes se sentent alors «coincées», surtout lorsquil existe un rapport hiérarchique. Ce qui peut apparaître comme un jeu devient un piège…
Le pouvoir de toucher autrui, livresse de sauver des vies
Plus profondément, ce rapport au corps aurait surtout favorisé une tendance au rapport de force et à la «domination». Le médecin a en effet cette possibilité interdite à tout autre que lui de pouvoir toucher le corps dautrui. Cette position de pouvoir induirait selon Martin Winckler une «ivresse celle d’être en position (fantasmatique) de « sauver des vies » et donc, d’avoir tous les droits sur elles», et un «rapport hiérarchique entre le patient exposé et vulnérable et un médecin qui se sent en position de supériorité et d’impunité et qui n’a pas de barrières personnelles à dresser entre ses désirs ou sa perversité et le corps du ou de la patiente».
Cest une figure qui rappelle celle du chaman ou du sorcier, et qui «catalyse depuis des millénaires les attentes, les espoirs et la confiance des humains»:
«Devenir médecin, c’est être assuré d’un statut, de revenus, de prestige et d’ascendant sur les autres […] Beaucoup d’individus deviennent médecins pour le statut et les privilèges que ça confère, et non pas pour soigner. Et certains pensent que parce qu’ils soignent, ils méritent ces privilèges, ce qui est moralement problématique.»
«Lesprit carabin fournit une bonne excuse pour des remarques sexistes»
Autre héritage de lHistoire, le statut de la profession et son organisation en corporation auraient renforcé à la fois le secret autour des dérapages commis et le sentiment de domination dune partie des membres du corps médical. «Il y a un vrai effet de solidarité qui fait que lorsquil y a des agressions sexuelles, cela remonte difficilement», commente Anne-Cécile Mailfert, porte-parole dOsez le féminisme, association qui s’est élevée contre la fresque du CHU de Clermont-Ferrand.
Face à un groupe fier de ses codes et sûr de ses traditions, il est plus difficile de sopposer ou dargumenter quand les limites sont dépassées. «Lesprit carabin fournit une bonne excuse pour des remarques sexistes voire des agressions sexuelles», résume Sophie.
Une interprétation qui nest toutefois pas partagée par le doyen de la faculté de médecine de Clermont-Ferrand, Jean Chazal, pour lequel cest au contraire la dissolution de lesprit de corps qui permet ces dérives:
«Il ny a plus de contrôle et desprit de famille. Je nai jamais vu de soirée sexiste quand jétais interne où la femme était mise au pilori.»
Sentiment dimpunité
Que lesprit de corps ait un effet positif ou négatif, il nen reste pas moins quil existe toujours une domination symbolique du médecin, à la fois en tant que groupe et vis-à-vis de son patient. Cette domination favoriserait au final un certain sentiment dimpunité, illustré par lépisode de la fresque des super-héros assaillant une possible ministre de la Santé.
«Toute autre personne peignant sur un mur serait verbalisée. Les étudiants en médecine, non. Ça témoigne d’un sentiment de propriété et d’impunité très problématique», commente Martin Winckler. «C’est une attitude de caste. Et l’attitude de caste fait le lit de toutes les dominations, le sexisme n’étant que la plus commune» fustige lécrivain, qui regrette que des médecins soient «fiers de se montrer librement avec leurs érections et leurs conquêtes sexuelles».
Un nouveau rebondissement dans lhistoire de la fresque du CHU de Clermont-Ferrand semble dailleurs illustrer ce sentiment dimpunité. Après que lassociation Osez le féminisme! a dénoncé ladite fresque, des membres du collectif «Les médecins ne sont pas des pigeons» ont incité tous les membres de la page Facebook du collectif à aller inonder le téléphone d’Anne-Cécile Mailfert de messages. Une «première» pour la porte-parole, qui affirme navoir jamais été «traitée» ainsi. «On est face à des personnes qui se croient toutes puissantes et se croient tout permis», regrette-t-elle. Le doyen de la faculté de médecine de Clermont-Ferrand Jean Chazal a lui aussi été «harcelé de coups de fils, de SMS, de mails de médecins, de responsable d’établissement qui soutiennent les internes», a-t-il dit à Libération:
«Je nai pas à défendre les médecins envers et contre tout. Cela me choque que mes confrères réagissent comme ça.»
Avec un peu de doptimisme, on peut néanmoins penser quà la faveur de la féminisation de la profession, les choses finissent par changer. Cest en tous cas ce que veut croire Pauline, dont la promotion comptait «82% de filles». Rendez-vous dans vingt ans.
* Le prénom a été changé Retourner à l’article »… (Extrait).
http://www.slate.fr/story/97555/comment-pourquoi-sexisme-medecine-francaise
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J’avais eu plusieurs consultations avec un gynécologue -spécialement pour un frottis- et tout se passait très bien
Jusqu’au jour où je lui ai demandé de « remuer la sonde -de son échographie- plus doucement »
Et que je l’ai entendu murmurer « C’est troublant ce que vous me demandez là « !!!!!!!!!!!!!!!
Je ne suis pas « la perdrix de l’année », han, han, han
On peut imaginer pire avec des jeunesses affriolantes ?