La Bête que j’ai été, par Jean-Pierre Gosse, avec l’aide de Guillaume Clavaud. Alter Ego Éditions.
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« L’affaire des «Réunionnais de la Creuse», une «cicatrice» à recoudre:
Par Laure EQUY
« ce sont aussi des mineurs qui partent. Pas tous orphelins. A des parents indigents, on fait miroiter des écoles prestigieuses de la capitale pour leurs enfants et leur retour à la Réunion pour les vacances. «Votre fils sera docteur», «il verra la tour Eiffel» Séduits par ce miroir aux alouettes tandis quici ils peinent à nourrir leur famille, ils signent. Les analphabètes apposent leur pouce trempé dans lencre sur le document de lassistante sociale. Débarqués à Orly, il nest plus question de Paris mais dun aller sans retour dans la Creuse, le Gers, le Tarn. Les enfants sont plus ou moins mal lotis. Quelques-uns sont adoptés, dautres placés en foyers ou ballottés dans des familles daccueil payées par la Ddass. Dautres petits sont envoyés dans des fermes, des commerces, des petites entreprises ou sur des chantiers. Comme apprentis et surtout comme une toute jeune main-duvre gratuite et corvéable. Fugues, délinquance, dépressions voire suicides: pour certains, le déracinement est brutal, dramatique « …(Voir récit ci-dessous)
…L’Assemblée débattra mardi d’une proposition de résolution pour «diffuser la connaissance historique de cette affaire».
Ils seront une trentaine, mardi prochain, conviés à écouter les débats des députés depuis les strapontins de velours rouge de la tribune du public. Des échanges autour de la proposition de résolution du groupe PS sur ce que lon a appelé «laffaire des Réunionnais de la Creuse», ils ne perdront pas une miette. Cest leur histoire, celle aussi dun Etat qui, selon le texte, «a manqué à sa responsabilité morale» à légard de ses anciennes pupilles, que lAssemblée nationale sapprête à reconnaître »…
(Extraits)
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Par Julien Rapegno:
… »Les pieds gelés, sans chaussettes dans ses bottes
Avec Jean-Pierre Gosse, débarque à quatorze ans au foyer de l’enfance de Guéret, en décembre 1966.
« Il a pris l’avion à 14 ans plein d’espoir, il voulait être médecin ».
Après un mois passé au foyer de l’enfance de Guéret, l’adolescent est placé en famille d’accueil, chez des agriculteurs de Jouillat. Le début de l’enfer. Il dormait dans la grange, n’avait qu’un seul repas par jour, on lui donnait les restes qu’il devait partager avec le chien. »
Le petit commis noir finit à l’hôpital avec les pieds gelés dans ses bottes. Sa famille d’accueil ne lui avait jamais fourni de chaussettes. Les services sociaux, qui « suivent » les jeunes Réunionnais à Guéret, le renvoient aussitôt à Jouillat. Les vexations continuent. Il tente de se pendre à la chaîne des vaches.
Plus tard, il est envoyé dans une autre ferme, à Rimondeix. Encore une mauvaise pioche : « Il dormait dans la porcherie, mangeait les granulés des cochons et se réchauffait la nuit auprès des truies », résume Geneviève. Quand il se sauve, son patron lui passe un fer à la cheville comme un cochon ! C’était en 1967, et non il y a un siècle. « Aujourd’hui, quand on donne une claque à un gamin, on va en prison ! », compare Geneviève.
« C’était un homme brisé »
À partir de 1968, la rencontre sordide de Jean-Pierre Gosse avec la Creuse paysanne prend un tour plus humain, à Sainte-Feyre : « Pour la première fois, j’ai pu rentrer dans la maison de famille, avoir des contacts avec les enfants du patron », écrit-il.
On le nourrit correctement et, pour la première fois également, l’apprenti reçoit une rémunération »…
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Un autre déplacé (déporté ?)Jean-Jacques Martial, a raconté son histoire dans un livre, Une enfance volée (Ed. Les quatre Chemins, 2003), postfacé par Yvan Combeau et Sudel Fuma.
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Aller sans retour pour la Creuse:
« Quand Michel Debré élu député de la Réunion en mai 1963 contre le communiste Paul Vergès, il se fait fort de désamorcer la cocotte-minute que représente alors le climat politique et social de la Réunion
En organisant, notamment le transfert de Réunionnais semble-t-il condamnés à la pauvreté vers ces campagnes qui manquent de bras…
«Votre fils sera docteur», «il verra la tour Eiffel» Séduits par ce miroir aux alouettes tandis quici ils peinent à nourrir leur famille, ils signent. Les analphabètes apposent leur pouce trempé dans lencre sur le document de lassistante sociale…
Aussi des mineurs qui partent. Pas tous orphelins…
Débarqués à Orly, il nest plus question de Paris mais dun aller sans retour dans la Creuse »
Des familles brisées à jamais …
Michel Debré, grand chrétien devant l’Eternel, en manipulant des enfants
Comme des pions sur son échiquier politique, avait ouvert des plaies qui ne
sont toujours pas refermées…
Peut-on dire que ces enfants ont été déportés, Car obligés de se soumettre au système mis en place, et trompés sur la vraie nature de leur déplacement ?
Définition du dico: « La déportation est l’action d’obliger quelqu’un, le plus souvent un groupe de personnes, de quitter son habitat, soit pour l’obliger à s’installer ailleurs, soit pour le détenir dans des camps. »