A Fort-Dauphin, les séquestrés de Rio Tinto
Perle Zafinandro-Fourquet, une française dorigine malgache, et six membres de lassociation Fagnomba (Entraide), sont incarcérés depuis le 12 mars dernier dans les geôles de la prison de Fort-Dauphin (Sud-Est de Madagascar), officiellement pour avoir cassé un bureau électoral, officieusement parce quils se font les porte-parole des petites gens de la région, chassés de leurs terres pour laisser la place aux activités dextraction du minerais dilménite de la multinationale anglo-australienne Rio Tinto. Le petit peuple de la région est encore victime de la dégradation de ses zones de vie, par la destruction de lenvironnement quimpliquent les procédés industriels mis en oeuvre sur les 2000 hectares du site minier, concédés pour 40 ans à la société locale créée pour loccasion, Qit Madacascar Minerals (QMM), par lEtat malgache… associé à lopération.
Depuis le début de lannée, la tension monte à Fort-Dauphin, et nombre de manifestations ont été organisées par les villageois de la région de lAnosy frustrés davoir été, pour certains, spoliés de leurs terres sans indemnisation, quand dautres sestiment lésés par des expropriations compensées de manière symbolique, au regard de la flambée des prix du terrain provoquée par louverture du placer de Rio Tinto à Mandena ; en attendant Sainte Luce et Petriky. Par ailleurs, les populations locales, fort modestes pour la plupart, vivent mal les atteintes à un milieu dont ils tiraient une partie de leur subsistance. La qualité des eau est dégradée, la pêche rendue impossible par les modifications hydrographiques, la forêt est détruite et le littoral rendu inaccessible. Si les habitants sont conscients des opportunités offertes par Rio Tinto, en termes demploi et même daction sociale – lEtat étant totalement absent en la matière – tout un chacun est à même de comprendre que cest un véritable pillage des sols malgaches qui est en train de se dérouler sur place, sans véritable contrepartie, plus-value, ou conséquence positive pérenne
En ce sens, ce qui se passe à Fort-Dauphin est emblématique dune problématique littéralement néo-coloniale dampleur nationale.
Le site de Ranobe, dans la province de Tuléar (Sud), connaît le même « développement », et après Manakara ou Fénérive-Est, il est question dexploiter des gisements dilménite au sud de Toamasina (Tamatave), entre Ivondro et Ankarefo.
Le mauvais sort fait à Perle Zafinandro-Fourquet, embastillée par larmée, qui assure la sécurité de Rio Tinto moyennant finance, est donc symbolique de celui qui est infligé à toutes ces populations, privées de voix et de visibilité, parce que trop miséreuses et anonymes pour être prises en considération.
Née à Fort Dauphin, Perle Zafinandro-Fourquet a longtemps vécu à La Réunion où elle sest mariée et a fondé une famille. Aujourdhui de nationalité française, elle est retournée à Madagascar, à Fort Dauphin, pour monter une affaire de tourisme, et cest alors quelle a pris conscience de la détresse des déplacés de lAnosy, condamnés à la misère pour que dautres fassent fortune.
Pour être actifs, les membres de lassociation Fagnomba ne sont pas pour autant des terroristes. Ils ne refusent pas le développement industriel, la présence de Rio Tinto, mais revendiquent la prise en compte de leur situation, et laggravation de leurs conditions de vie du fait de limplantation de lusine dextraction dilménite. Leurs manifestations sapparentent plus à des jacqueries désespérées quà de la guérilla urbaine. Et il suffirait de peu, finalement, pour que la tension sociale, suscitée par un fort sentiment dinjustice sapaise. Mais la proximité des élections, législatives et présidentielle, tétanise les autorités locales qui craignent de payer dans les urnes le peu de cas fait aux petites gens, qui sont aussi des électeurs. Et comme Perle Zafinandro Fourquet, la présidente de Fagnomba est tout à la fois populaire et originaire de Fort Dauphin, son incarcération sous un prétexte crapuleux a pu passer comme une opportunité pour susciter un hors-jeu politique
Or la médiatisation de cette affaire est en train de produire leffet inverse. Menacée, traquée, embastillée, Perle Zafinandro-Fourquet devient à son corps défendant la pasionaria des pauvres de Fort Dauphin et de lAnosy.
Cest donc pour obtenir sa libération et la prise en compte des revendications de ceux quelle défend que le « Comité de soutien Libérez Perle et Fagnomba » organise, ce mardi 16 avril, une conférence de presse, à 15 heures, au restaurant « Chez Kalou », situé au rond-point devant lhôpital de Terre Sainte (Saint-Pierre) ».
***************************************************************************
Partout on chasse des petites gens de leur terre pour engendrer des usines à fric
Qui dégradent, polluent, détruisent l’écosystème, aggravent la misère… !
Saletés de sociétés !
