(photo: « Origine du monde » de Courbet.)
» Mon vagin, mon village (Eve Ensler)
Mon vagin était une fraîche prairie vert et rose. Les vaches paissaient, mon
fiancé me caressait tendrement avec un fétu de paille blonde.
Il y a quelque chose entre mes jambes. Je ne sais pas ce que c’est. Je ne sais
pas où c’est. Je ne veux pas y toucher. Plus maintenant. Plus depuis. Plus
jamais.
Mon vagin était bavard, il ne pouvait attendre, il en disait, il en disait.
Depuis que je rêve qu’il y a un animal crevé cousu entre mes jambes avec du fil
noir, il ne parle plus. Et l’odeur horrible de l’animal mort m’envahit. Et sa
gorge tranchée saigne et tache mes robes d’été.
Mon vagin connaissait toutes les chansons de femmes, toutes les chansons
paysannes, toutes les chansons des forêts d’automne, toutes les chansons du
pays.
Depuis que les soldats y ont glissé le canon de leur fusil, il ne chante plus.
L’acier était si froid qu’il m’a glacé le coeur. Vont-ils tirer, vont-ils
l’enfoncer jusqu’à mon cerveau qui se tord de peur; je ne sais pas. Six d’entre
eux, monstres affreux encagoulés de noir, m’enfoncent des bouteilles aussi et
des matraques et un balai.
Mon vagin était l’eau d’une rivière où il faisait bon se baigner, eau claire,
courant sur les pierres inondées de soleil, sur la pierre de mon clitoris,
encore et encore.
Depuis que j’ai entendu la chair se déchirer avec un bruit strident, la rivière
ne coule plus. Plus depuis qu’un morceau de mon vagin, un morceau de ma lèvre
est resté dans ma main.
Mon vagin. Village vivant, doux et chaud. Mon vagin, là où je suis née.
Depuis que, pendant sept jours, ils m’ont chacun à leur tour, puant la merde et
la pourriture, inondée de leur sperme immonde, je n’y habite plus. Je suis
devenue une rivière charriant le pus et les poisons et toutes les récoltes sont
mortes et tous les poissons.
Mon vagin, village vivant, doux et chaud.
Ils t’ont envahi. Massacré.
Incendié.
Je ne peux plus te toucher.
Je ne peux plus venir te voir.
J’habite ailleurs à présent.
Ailleurs.
Mais je ne sais pas où c’est. »
Extrait des « Monologues du Vagin » – Eve Ensler – Lez/zone
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« 1O/ 08/2006 01:00 Mon vagin, mon village – Les Monologues du Vagin – Eve Ensler
J’ai interviewé des femmes bosniaques dans des camps de réfugiés pendant la
guerre en ex-Yougoslavie.
Vingt à soixante-dix mille femmes avaient été systématiquement violées, sous
prétexte de tactique de guerre, en plein milieu de l’Europe, en 1993. Il est
très choquant que si peu de gens aient essayé d’y mettre un terme. Cela dit,
cinq cent mille femmes sont violées tous les ans dans notre pays et nous ne
sommes pas en guerre, enfin, théoriquement.
Ce monologue est inspiré par l’histoire d’une de ces femmes. Elle était
musulmane, comme la plupart des femmes interviewées. Avant cette guerre, le viol
n’avait jamais fait partie de leur culture. Ce monologue lui est dédié, ainsi
qu’à toutes ces femmes extraordinaires de Bosnie et du Kosovo. »
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Quand je lis ce texte, ma rage est submergée par une insupportable tristesse…C’est ça AUSSI, des porteurs de pénis!
Ils l’utilisent pour semer la honte, la destruction, la haine, l’horreur et la mort…Alors qu’il est programmé par la nature, pour donner la vie dans l’amour !
Maudite humanité !











