
( Image- Pas de doute: celle-là…elle « SAIT » !)
Je ne suis pas folle ! – Les femmes de Stepford, roman dangoisse écrit en 1972 par Ira Levin parle de la difficulté dune femme devant labîme sans fin de la prise de conscience. Maintenant elle sait. Et rien ne sera plus jamais comme avant. Comment continuer à subir quand on sait ? Voilà pourquoi les femmes préfèrent ne pas savoir.
Une seule solution : trouver des alliées. Quand on commence à savoir, il faut se battre pour survivre. Sinon lentourage rend la vie impossible. Je ne suis pas folle se dit Johanna, lhéroïne du roman.
La transformation des êtres en machines et laliénation brute suinte directement de la mère patrie, au coeur de la bête capitaliste, propulsée par la plus haute technologie mise au service de la barbarie patriarcale avec ses rêves morbides de contrôle total sur le corps et lâme des femmes.
Analyse et résumé du roman, ci-après.
LES FEMMES DE STEPFORD.
« Ira Levin est lhorloger suisse des romans à suspense, alors que nous autres nous ne faisons que les montres à pas cher que lon trouve en supermarché. » Stephen King
Ce roman dangoisse classé dans la littérature fantastique a été écrit en 1972 par Ira Levin. Il est assez typique des angoisses ressenties devant le caractère « unidimensionnel » de la vie dans les métropoles, où les individus sont broyés et où le champ de leurs espoirs sarrêtent à laménagement de leur domicile.
Cette angoisse est écrite depuis le point de vue dune femme mariée de la petite-bourgeoisie qui na pas demploi à lextérieur et qui découvre peu à peu que ce confinement absolu des femmes dans les tâches ménagères et lanéantissement qui sensuit na rien de normal, mais est le fruit dune volonté délibérée de la part des hommes de les transformer en robots potiches-boniches.
Un couple petit-bourgeois emménage donc à Stepford, une banlieue rurale pas très loin de New York. Lhéroïne du roman se nomme Joanna, elle ne travaille pas à lextérieur, fait des photographies pour des agences de presse et soccupe de ses enfants, tout en ayant une sensibilité moderne et féministe. Le mari, Walter, a lair compréhensif, pas macho et plutôt dans le genre ouvert et progressiste.
Tout se présente sous les meilleurs auspices, et tout est normal, trop normal. La stupeur de Joanna commence sourdement lorsquelle rencontre ses voisines, femmes au foyer mariées à des cadres des usines alentour. Le style « behaviouriste » de lécriture (qui décrit à la loupe les décors, les gestes et mimiques des personnages sans rien dire de leur intériorité) contribue à cette atmosphère doppression lourde et statique qui dépeint la face ménagère de la définition capitaliste du bonheur sans espoir ni rêves. Tout le village est comme hanté par un épais sortilège.
Lhéroïne Joanna rencontre alors une copine, Bobbie, qui a les mêmes idées quelle et rejette ce style de vie chlorophormé. Toutes les deux, elles tentent daider ces femmes boniches et potiches à ouvrir les yeux sur leur condition malheureuse et non-libre, en leur demandant de sorganiser entre femmes. En effet, il y a dans Stepford une mystérieuse « maison des hommes » interdites aux femmes, où toutes les affaires communes de la communauté sont décidées.
Mais le refus ou lindifférence de ces femmes, sauf une, est de marbre. Les deux amies remarquent aussi que la mise de ces femmes est toujours impeccablement soignée, quelles ne haussent jamais le ton, et arborent toutes des seins exceptionnellement plantureux. Cest une sorte de « perfection » dans la soumission à usage masculin que que les deux amies rejettent et veulent à tout prix comprendre.
Quelle nest pas leur surprise lorsquelles apprennent qu a existé à Stepford, dix ans auparavant une « maison des femmes » de sensibilité féministe! Elles mènent lenquête auprès des femmes ayant participé à cette initiative. Mais lenquête tourne court, les femmes de Stepford étant totalement obnubilées par leur ménage :
« Que dites-vous de la blancheur de ma lessive? Demanda-t-elle toute fière de ranger le jersey aux plis impeccables dans le panier à linge. Telle une actrice de film publicitaire.
En fait, elle létait, comprit brusquement Joanna. Elle létaient toutes, sans exception, ces femmes de Stepford. Des actrices de films publicitaires, ravies de leurs choix en matière de lessive, cire et produit de nettoyage nettoyage; de leurs shampooings comme de leurs désodorisants. De jolies actrices, fortes de poitrine mais faibles de talent, qui jouaient sans conviction les ménagères de banlieue, trop chochottes pour être vraies. »
Joanna et Bobbie échafaudent donc des hypothèses sur cette situation, pensant que les émissions des usines chimiques avoisinantes ont sûrement produit des effets calmants sur les femmes. Mais la suite des découvertes de Joanna lui montrera quelle était encore très en-dessous de la vérité!
Elle remarque que ses deux amies émancipées tombent une à une et se transforment en boniches-potiches comme dans un cauchemard, et que cela a toujours lieu après avoir passé un week-end en amoureux avec leur époux. Bobbie, la femme si libérée, néchappe pas à cette lugubre transformation. Langoisse monte alors dun cran.
« Laccueil de Bobbie fut chaleureux, celui des gosses et des chiens démonstratif. Bobbie leur prépara du chocolat et Joanna porta le plateau dans la salle de séjour.
Regarde où tu mets les pieds, prévient Bobbie, jai mis de la cire ce matin.
Je men suis aperçue, dit Joanna.
Elle sassit dans la cuisine et regarda Bobbie la belle, la scuplturale Bobbie en train de nettoyer le four, armée de serviettes en papier et dune bombe décapante. (
)
-Tu nas pas fumé? Tu nas pas pris des trucs? De la drogue par exemple?
-Non, ne sois pas idiote!
-Bobbie, tu nes plus toi même. En as-tu conscience? Tu es devenue semblable aux autres!
-Franchement Joanna, tu débloques. Bien sûr que je suis moi-même. Je me suis simplement rendu compte à quel point jétais négligente et narcissique, tandis que maintenant jaccomplis ma tâche ponctuellement comme Dave remplit la sienne.
-Je sais, je sais, dit Joanna. Et lui, que pense-t-il de tout ça?
-Il en est très heureux.
-Le contraire maurait étonné.
-Ce produit est merveilleusement efficace. Tu le connais.
Non, je ne suis pas folle, pensa Joanna. Je ne suis pas folle. »
Lhistoire se noue avec la découverte stupéfiante de Joanna, dont les indices ont été disséminés malicieusement par lauteur tout au long du roman. Lintrigue saccélère, Joanna voit que son mari est de mèche dans la machination, et quelle est la future victime sur la liste.
Son mari, voyant quelle a découvert la vérité abominable, tente de la faire passer pour folle, de lui imposer « la raison » et la normalité à laide de la psychiatrie, puis tente de lenfermer à la maison en ayant eu soin de lui dérober ses deux enfants. La seule alliée qui reste à Joanna dans sa tentative de libération est une femme afro-américaine, nouvellement intallée dans la zone, qui représente lespoir, car elle nest pas intoxiquée par cette réalité, son mari, noir lui aussi ne faisant dailleurs pas partie de la « maison des hommes ». Elle tente donc de fuir pour la rejoindre.
« Il lui faudrait près dune heure pour y arriver. Plus, sans doute, avec cette neige qui tapissait le sol, et dans lobscurité. Et elle nosait pas faire de stop, de peur de tomber inopinément sur Walter.
Et pas seulement sur Walter, songea-t-elle brusquement. Tous, autant quils étaient, allaient se mettre à sa recherche et sillonneraient les routes armés de torches et de projecteurs. Comment la laisseraient-ils jamais séchapper et tout révéler? Chaque homme représentait une menace, chaque voiture un danger. »
Ira Levin a peut être puisé dans la tradition des films dangoisse des années 1950 comme « The invasion of the body snatchers » (stricto sensu linvasion des voleurs de corps, mais traduit en français par linvasion des profanateurs de sépulture), où on voit les habitants de tout un village être « remplacés » par leurs sosies qui nont plus aucun sentiment ni expression et deviennent des machines terrifantes. Ces films sont clairement des films de guerre froide anti-communistes et visent à renforcer la foi capitaliste en la « liberté » individuelle contre le collectivisme oriental stigmatisé comme déshumanisant.
Mais avec Ira Levin, cest tout le contraire. La transformation des êtres en machines et laliénation brute suinte directement de la mère patrie, au coeur de la bête capitaliste, propulsée par la plus haute technologie mise au service de la barbarie patriarcale avec ses rêves morbides de contrôle total sur le corps et lâme des femmes. Voilà ce qui est attaqué frontalement dans ce roman.]
Source : Têtes hautes et regards droits.
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» Une seule solution : trouver des alliées. Quand on commence à savoir, il faut se battre pour survivre. Sinon lentourage rend la vie impossible. »
Des alliéEs ? ? ? J’en sais quelque chose, sur « l’entourage » de blog.fr !
« Comment continuer à subir quand on sait? Voilà pourquoi les femmes préfèrent ne pas savoir. »
Hé oui : ne PAS VOIR, ne PAS ENTENDRE et ne RIEN DIRE…
Q' »Elles » crèvent en « paix » , AMEN !