Nous louons un bungalow dans une résidence de Flic en Flac, à cause du job de mon homme, qui nous oblige à faire le va-et-vient, entre la Réunion et Maurice.
Depuis le premier jour, nous avons été intrigués par le manège d’un cardinal au ventre d’un orangé flamboyant. Il exécutait un rituel étrange devant la fenêtre, en volant à la manière d’un yoyo, tout contre et sur toute la hauteur de la vitre, pendant une demi-heure et plus, s’arrêtant de temps à autre. Parfois il restait stationnaire, battait des ailes et tapait du bec contre la vitre. Ce rituel débutait aux environs de 6h30, et se renouvelait plusieurs fois par jour.
Nous avons d’abord pensé qu’il était tombé amoureux de son image qu’il aurait prise pour une oiselle…ou un autre oiseau. Nous n’osions pas intervenir, de peur de l’effaroucher.
Et puis, nous avons placé une soucoupe avec du pain et du riz, ainsi qu’un petit bol d’eau, sur le rebord de la fenêtre. Il stoppa son manège et dévora goulûment les grains de riz, délaissant le pain.
Peu après, nous avons déplacé les récipients à l’intérieur de la fenêtre, que nous prenions soin de presque refermer, pour que les nombreux oiseaux fréquentant la résidence soient maintenus à l’écart.
Crazy a vite pris l’habitude de signaler son arrivée derrière la vitre par des chants et des coups frappés à la vitre. Pendant nos absences fréquentes …il allait frapper à la fenêtre de ma fille à l’étage au-dessus ! Quand j’allais à la piscine, il se perchait sur la branche d’un cocotier, penchée au-dessus de l’eau, et se mettait à chanter pour manifester sa présence.
Quand il pénétrait chez nous, à l’intérieur de la fenêtre, il se mettait à faire des trilles vibrantes, pour signaler sa présence, ou pour remercier (!). Nous n’avons jamais pu l’approcher à moins de 2 mètres; mis à part la fois où il s’est aventuré dans le salon, et n’a plus retrouvé la vitre de sortie: je l’ai pris dans mes mains pour lui rendre sa liberté .
Il avait appris à descendre du cocotier où il créchait,pour se poser sur le rebord de la fenêtre, quand mon époux ou moi, l’appelions en sifflant.
Un jour , nous l’avons vu arriver en compagnie…de deux petits, volant encore maladroitement. Et c’était un vrai bonheur de voir Crazy, éduquer ses petits , tous trois accrochés au rebord de la soucoupe!
Six mois plus tard, en arrivant un jour, de la Réunion, nous avons constaté son absence alors que toutes les fois précédentes nous le retrouvions, fidèle au poste.
Nous n’avons jamais revu Crazy, ni ses petits . J’ai questionné les jardiniers, les gars du service de sécurité, la femme de ménage, qui est aussi employée dans d’autres bungalows : rien!
Jusqu’à aujourd’hui…j’attends le retour de Crazy; et quand j’entends les trilles d’un cardinal, perché près du bungalow, je siffle…en vain: l’oiseau s’éloigne indifférent.
PS- Je ne peux m’empêcher de penser à la douloureuse stupeur de ma voisine d’Ardèche, dont le mari a un beau jour disparu, sans crier gare. Ce sont ses 3 fils ( adultes) qui l’ont pisté depuis son travail, pour l’obliger à venir dire à sa femme qu’il résiderait…chez une autre femme désormais.